dimanche 9 septembre 2012

Jbel El Ayachi- La montagne mythique.

Quand on s'émerveille sur Midelt, ce n'est pas seulement au cadre urbain que l'on pense, mais également 'à son admirable Jbel El Ayachi . Jbel El Ayachi est une entité magique, une rêverie qui nous éloigne des contingences les plus contraignantes.

La chaîne d'El Ayachi, dans sa majestueuse et imperturbable splendeur, domine au sud ouest la ville de Midelt. Le cime le plus haut de cette chaîne est à 3747 mètres. Le nord de la chaîne présente l'un des plus beaux paysages naturels du pays, avec ses parois grises, ses éminences, ses collines, ses vallées, ses crevasses, ses forets de chênes et de cèdres, ses gorges( dont les plus attrayantes pour les touristes, le cirque de Jaâfar et les gorges de Berrem).

El Ayachi, avec ses sources intarissables, est considéré comme l'un des grands châteaux d'eau du Maroc. Les anciens de la région se souviennent de ses neiges éternelles. Aujourd'hui, il reste couvert de neige jusqu'au mois de juin. Les neiges d'El Ayachi intéressent beaucoup les fellahs de la région. Quand au mois de novembre, les pics en surplomb d'El Ayachi deviennent blancs, les agriculteurs berbères disent : "Elayachi met son turban"terrezt", c'est une bonne augure pour l'année agricole.". Et si, au mois de janvier, il devient tout blanc, pour eux c'est son burnous qu'il porte , un bon présage pour les nappes phréatiques.
Pour atteindre le sommet d'El Ayachi, les marcheurs doivent quitter Tatiouines à l'aube. L'accompagnement d'un bon guide est recommandé. Les gens qui l'ont escaladé, toute leur vie durant, ils porteront ces lieux fantastiques en eux. ils n'oublieront jamais les émotions fortes de l'ascension, la beauté et la pureté des lieux. Et quand on atteint le sommet que rien ne surpasse*, on a des sensations bizarres de quiétude et de liberté, des sensations non dénudées de dimension spirituelle.
De là haut, l'oeil embrasse l'immensité de la vallée qui sépare la chaîne El Ayachi-Moaskar des montagnes du moyen Atlas. Un paysage grandiose.

L'une des singularités de cette chaîne , c'est qu'elle abrite , en plus de sa faune diversifiée, le fameux vautour " "Gypaète barbu", le seul vautour actuellement sédentaire dans notre pays. Les spécialistes recensent une vingtaine de couples éparpillés dans les montagnes haut-atlasiques.

* : Selon " La grande encyclopédie du Maroc", le Maroc est le haut toit du monde Arabe et de l'Afrique nord saharienne.


N.B: la photo montre notre arrivée , en 1985, au point culminant d'El Ayachi, matérialisé par une plaque métallique. Nous étions une vingtaine de personnes. Je tiens à remercier mon grand ami Si A. El Hatout, l'instigateur de cette aventure à jamais inoubliable.

vendredi 31 août 2012

Algique ou Nostalgique- Par Salah Abdelmoumen


Je voudrais approcher le nostalgique par un angle quelque peu commun, juste pour sortir des sentiers battus, sans pour autant paraphraser ou rechercher une quelconque résurgence avec des concepts saugrenus. Chacun éprouve automatiquement une certaine nostalgie temporale et spatiale dès qu’il s’éloigne de son fief ou avance dans l’âge.

En fait à mon avis il y a deux types de nostalgiques :

Le  nostalgique passif : est celui qui ne cesse de ressasser ou de se remémorer avec regrets des moments doucereux qui furent éphémères pour lui. C’est quelqu’un qui ne cherche aucune prise ni sur le temps ni sur l’espace.

Le nostalgique actif : est celui qui au contraire, revient souvent chercher à créer des moments heureux semblables à ceux qu’il a vécu, revient également pour agir sur l’espace, sur le milieu en vue de favoriser la survenue de périodes fastes analogues à celles déjà vécues.

C’est de ce phénotype dont je veux parler pour le cas de Midelt. Combien de personnes se sont déclarées nostalgiques pour « le petit Paris » mais combien d’entres elles ont  bougé le petit doigt pour porter secours à cet espace tant adulé au moment où il agonisait. En réalité, il n’y a pas grand monde qui se bouscule au portillon. Entre ceux qui veulent garnir leurs bourses sur le malheur des autres, ceux qui clament détenir la logique divine et qui font le dessous des tables, ceux qui sautent sur les rennes pour rester en croupes le pied bien à l’étrier et à l’abri du temps qu’il fait, il y a ceux qui ne font rien sauf  qu’ils vitupèrent sans scrupule, tirent sur tout ce qui bouge pour décourager les âmes charitables,  les  bonnes volontés et les nostalgiques actifs.

Pendant plusieurs années, j’ai vu défilé ce genre d’énergumènes, qui sans vergogne s’improvisent en sauveurs incontestés de Midelt  tantôt arborant l’érudition, tantôt de belles pièces sonnantes et trébuchantes, tantôt même la main de Dieu. Tous les moyens étaient bon pour aliéner ces pauvres gens que la rudesse du climat, doublé d’un analphabétisme accrue et d’une misère incommensurable ont rendu leur bon sens  effrité et vulnérable.

Mais Dieu merci, les honnêtes gens existent encore dans cette contrée, qui, quoique peu nombreux, continuent à vouer une inclination insoupçonnée envers Midelt. Oui ces gens là,  agissent  dans l’ombre et   donnent sans rien attendre en retour, avec le seul souhait de voir se reconstituer un biotope  favorable à l’éclosion d’une ère nouvelle  faste pour le bled et leur descendance.

Il a fallu que les nostalgiques mais actives neiges éternelles d’EL AYACHI du côté d’ANFGOU donnent au destin un coup de pouce pour que les vents favorables soufflent de nouveau sur Midelt.
Et la lumière de la province fut et vint illuminer ce ciel longtemps resté brumeux en proie à une poudreuse qui affectait les voyants invétérés. Dirigé par un homme juste et droit, cette ville renaît de ses cendres et les espoirs et doléances longtemps jugulés  se concrétisent à une vitesse appréciable, venant prouver encore une fois que le bon sens est la chose la mieux partagée du monde. 

Merci mon Dieu, merci votre Majesté, de nous avoir gratifié d’un homme de cette trempe, valeureux et intègre qui doucement mais sûrement a su redressé la barre d’un navire qui allait droit sur les récifs.
Maintenant, il est temps que les nostalgiques actifs, viennent mettre la main à la pâte pour faire redorer le blason de cette région longtemps délaissée……Le climat s’y prête et l’écoute des premiers décideurs est active.

S.A

dimanche 26 août 2012

Midelt des Nostalgiques



La table des mideltis nostalgiques n’est jamais vide. A midelt avant la création de la province, le présent n’avait de sens que célébrant la passé. La ville n’intéressait que par ce qu’elle a été. Et pourtant, son passé prospère est relativement court. Il allait de la fin de la deuxième guerre mondiale au début des années 80 (date de la fermeture des mines). Pendant cette période, Midelt profita des activités accrues des zones minières de la région : Mibladen, Ahouli et Zaida.

En cette époque, ces mines de plomb connurent de grands travaux d’aménagement, le cours de plomb était élevé, la production augmenta, ce qui donna à Midelt un regain d’activité dans tous les domaines : commerce, constructions… La population de la nouvelle petite ville était composite, elle était multiethnique et multiconfessionnelle. Elle se composait de musulmans bérbéres et arabes (marocains et algériens), de chrétiens français, grecs et espagnols, de juifs mideltis et ceux venant du Tafilalt, de Gourama, de Debdou, des Ait Ishaq et d’ailleurs. De toutes les tribus environnantes, les ruraux surtout berbères venaient tenter leur chance, essayer de trouver du travail dans la nouvelle ville en construction ou dans les mines.
Selon les statistiques, rapportés par Mme Amina Aouchar*, la population de Midelt Ville en 1952 était de 4306 habitants dont 730 étrangers.

Tous les témoignages s’accordent pour donner de Midelt de l’époque une image d’une ville paisible où il faisait bon vivre. Avant l’indépendance, la sociabilité à Midelt était, selon mes sources, réelles mais fractionnées par groupe ethnique. Chaque groupe avait ses barrières invisibles. Les chrétiens vivaient entre eux, ils se recevaient beaucoup, organisaient des pique niques vers le château du lac à Aguelmam N’Sidi Ali ou au bord du fleuve de la Zaouia Sidi Hamza et à l’Insgmir. Ils organisaient des parties de chasse, dans les forets de Tounfite, celle d’Itzer et dans la plaine du Dahra. Beaucoup d’entre eux évoquent encore aujourd’hui, avec émotion, la belle vie qu’ils ont eue à Midelt et région. Dans leurs écrits ou dans leurs commentaires sur les blogs Mideltis, continuent toujours de vouer pour cette ville un amour et un attachement qui résistent aux vicissitudes du temps et de l’éloignement.

De leur côté, les juifs avaient leurs réunions, leurs fêtes religieuses, leur pèlerinages sur le tombeau du Saint local, « Moul kaf » ou des saints régionaux. Dans un témoignage sur la toile, un juif midelti dit : « les juifs de Tachaouite, le samedi après midi, quand il fait beau, se réunissent à Moul Kaf. Et pendant les cérémonies de mariages juives, on  emmène la nouvelle mariée à la rivière d’Outat.

Les musulmans vivaient également entre eux, ils fréquentaient leur café maure, leur hammam, leur souk et aussi le seul cinéma de la ville. Le « Coq d’or », l’ « Occidentalis » et les autres cafés de la nouvelle ville étaient animés au moment du protectorat par une clientèle chrétienne assidue. Avant l’indépendance, peu de musulmans fréquentaient ces cafés. Les chrétiens dansaient entre eux, sauf rare exception.

Après l’indépendance, l’ambiance dans la ville de Midelt et dans les mines changea. Les Français qui sont restés dans la ville ne voyaient plus les autochtones avec l’œil de l’occupant. La sociabilité devient réelle.

La nostalgie d’une ville est ancrée dans la tête de ses anciens, de ses poètes, de ses écrivains. Bienque j’ai atteint l’âge nostalgique (bientôt 32 ans de vie à Midelt), je laisse le soin aux écrivains qui portent cette ville dans leurs cœur de dire un mot de cette période chère à leur esprit et à leur cœur. 

dimanche 19 août 2012

Aid Moubarak Said!

Je tiens à souhaiter une très bonne fête à tous les lecteurs du blog.
                                                        Aid Moubarak Said !





Beaucoup d'entre vous ne reconnaîtront pas cette image. Il s'agit d'un beau jardin nouvellement crée à l'entrée de Midelt, en arrivant de Meknès.
Cette oeuvre témoigne de l'élan de dynamisme et de modernité que la vile de Midelt a la chance d" acquérir depuis la première visite de Sa Majesté dans la région.
Élevée à l'échelle de Province , notre ville se métamorphose à vue d'oeil.  L'énergie soutenue et continue des décideurs locaux la fait sortir de l'agonie et du marasme qui l'ont sclérosé des décennies durant depuis la fermeture des mines.
L'avenir de notre ville au passé choyé restera prometteur inchaallah!
En témoignent les différents chantiers importants ouverts un peu partout dans la région.



dimanche 8 juillet 2012

Parution du livre "Les Ait Hdidou "- Par Aomar Kherdi

Monsieur Aomar KHERDI , natif de Tounfite, ancien élève du collège d'Azrou, titulaire d'"une licence en Droit Privé ( entre autres), avec lequel je partage la passion pour la culture de notre cher terroir, la Haute Moulouya Orientale, vient de publier un livre fort intéressant intitulé " Les Ait Hdidou- Organisations sociales et droit coutumier"- Préfacé par notre cher ami Michael PEYRON.
Toutes nos Félicitations à notre ami  Monsieur Aomar Kherdi .

lundi 23 avril 2012

Plus Forte que la Souffrance- Midelt ( le petit Paris) -

Vient de paraître un livre fort intéressant, écrit par Madame Souad Mekkaoui, intitulé " Plus forte que la souffrance" édité à La Croisée du Chemin. On y trouve une chronique familiale captivante et un volet intéressant consacré à la ville de Midelt " le petit Paris".

Toutes nos félicitations à la jeune écrivaine mideltie, et bonne lecture à tous!



Midelt sans voitures, les années 20 du siècle passé.



Midelt en 1952, début de la période des vaches grasses.

mercredi 18 avril 2012

Le Poète Amazigh ( boutiwent)

Dans le parler Amazigh, du Maroc central, tiwent signifie suture, couture. Chez les Ait Soukhmane, ce vocable est utilisé pour désigner « strophe », « vers » ou « poésie ».(1)
Le poète, boutiwent, participe par sa tiwent (sa poésie) dans le tissage de la grande toile de la littérature amazigh
Une région est faite de ce qu’en disent ses écrivains, ceux qui ont su l’aimer et l’exprimer dans son histoire, son essence, dans ses particularités.
Nos contrées (Aghbala et régions) sont faites, faute de l’écrit, de ce qu’en disent ses poètes. Le pâtre-poète (amediaz) rime dans ses strophes au rythme envoutant l’amour, la nostalgie et les vicissitudes de la vie. Il parle du quotidien et des particularités de sa région. Il participe ainsi à la perpétuité de sa culture ancestrale. Boutiwent comble, par son art, le vide laissé par les chercheurs et les écrivains qui tournent le dos à ses régions reculées et enclavées.
Boutiwent doit être traité avec honneur et recevoir les preuves de considération et d’estime qu’il mérite.

1- Voir le travail Pathos et Anthropos dans la poésie Amazigh de Mr Bassou Hamri, Université Soltan My Slimane – Béni-Mellal

N.B : Pour les lecteurs du blog, j’annonce que je me mets à la création. Je vais essayer, dans la mesure du possible, de commettre un travail sur la grande poétesse de ma région natale Aicha Out Yidir. Les strophes, les vers amazigh de notre région que vous voudriez bien me communiquer enrichiraient surement ce travail et aideraient dans cette recherche de notre mémoire littéraire commune.

vendredi 23 mars 2012

Les Ait Seghrouchen - Suite -

Les ait Tseghrouchen sont les berbères qui appartiennent à la grande famille ethnique des Zenètes ; ils descendent des grands nomades chameliers venus de l’est qui firent leur apparition en Afrique du Nord à la fin de la période romaine.

Leur confédération s’est formée vers la fin du XVI e. siècle. Elle tire son nom d’une légende ayant pour héros un saint Marabout, Moulay Ali Ben Amer, leur ancêtre éponyme.
Il aurait desséché un chacal qui dévorait une brebis (Sghr : faire sécher. Ouchen : Chacal). C’est l’hypothèse qui est généralement admise par les berbères de la région de Talsint, qui, à Tamslemt comme a Ghezzouane vénèrent les deux tombeaux de Moulay Ali Ben Amer (car il existe deux tombeaux du Saint).


Selon une autre hypothèse, deux grandes tribus Zénètes, les Ait Igher ou Sgher venus de Cyrénaïque et les Ait Ouchen originaires du Touat, se seraient rencontrées et alliées chez les Béni-Besri, autres frères de la race dont on retrouve des traces en tribu Ait Bou Meryem.


Aujourd’hui les Ait Tseghrouchen se divisent en deux groups :

Le group nord, qui dans le passé dut émigrer sous la pression de ses ennemis traditionnels, les Ait Yafelman, se répartit en deux sous groupements :

Les Ait Tseghrouchen d’Immouzzar et les Ait Tseghrouchen de Harira qui, attirés par les plaines du Sais, se sont installés à l’est et au sud de Fès.

Les Ait Tseghrouchen de Sidi Ali qui occupent le massif montagneux de Tichouk et le sud-est de ce massif, qui constitua pendant plusieurs années la petite Tache de Taza, région qui ne fut soumise qu’en 1926, après plusieurs années de lutte.

Enfin le groupe sud, le plus important, qui s’est installé sur les derniers chaînons orientaux du Haut Atlas et sur les hauts plateaux des versants nord et sud de cette chaîne. Talsint, à 90 kilomètres à vol d’oiseau au nord de Boudnib, se situe à peut prés au cœur de cette zone.

Ce groupe constitue, de ce fait, un véritable îlot Zénète entouré au nord et à l’est par des Arabes Oulad Khaoua, Oulad El Hajj et Beni Guil ; au sud et a l’ouest par les berbère Sanhadja, les Ait Aissa et les Ait Izdeg (Ait Yafelman).
portail talsint www.talsinnt.co.nr

Commentaire paru sur le blog echomidelt, le 4 octobre 2008 , du à l'obligeance de Mr NOUR

lundi 27 février 2012

Interview apparue sur le site Elksiba.com

" Aujourd’hui, il s’agit d’un autre profil, d’une autre vision et d’une autre compétence qui confirme encore une fois que notre ville Elksiba est riche en potentialités humaines.

Nous nous adressons, à travers cet entretien à M. Mouhib Mohamed, médecin et acteur actif dans le domaine associatif. On vous laisse découvrir d’autres aspects avec des retours sur le passé récent de la ville, sur ses lieux et ses sites, avec des rappels de ses personnages, des activités/loisirs d’enfance encore gravés dans nos mémoires, Des témoignages qui nous poussent à lire et à penser l’avenir de notre ville bien aimée.
Bonne lecture et bonne découverte. "
Mustapha Abbassi

Q : Une question classique et incontournable: qui est MOUHIB Mohamed?

R : Parler de soi-même, voilà un exercice plus difficile qu'il n y parait.
Je suis né à Aghbala d'une mère , elle même native d'Aghbala et d'un père originaire de Béni-mellal. J'ai grandi à El ksiba où j'ai résidé depuis 1964. J'ai eu la chance d’avoir une enfance et une adolescence sereines dans les trois localités où j'ai évolué.Le Primaire à Aghbala, le collège à Ksiba et le Lycée à Béni-Mellal.

Toutes les trois ont imprégné mon âme. Mais c'est à Ksiba que j'ai le plus de souvenirs, le plus grand nombre d'amis. Et, d'ailleurs, ma deuxième moitié est Kasbaouie. "Masquit Erras" à Aghbala ; "Masquit ElQualb" à Ksiba.

Q : Les Kasbaouis vous connaissent sûrement, mais connaissent mieux votre père, que Dieu l'ait en sa sainte miséricorde; pourquoi?

R : Effectivement, mon défunt père était très connu à Ksiba et ce pour plusieurs raisons. Sa sociabilité, son sens de l'humour: il avait toujours, que Dieu ait son âme, le mot pour rire. Mais aussi, je pense, par son métier: il exerçait l'un des métiers en voie de disparition (barbier). C'est lui qui avait circoncis des dizaines d'enfants à Ksiba et régions. Et il aimait Ksiba jusqu'à la moelle. Que Dieu l’ait en sa sainte miséricorde.

Q : Vous êtes très actif dans le domaine associatif, en plus des activités liées à votre métier initial; qu’en est aujourd'hui?

R : Aujourd'hui, j'ai l'insigne honneur de présider une association humanitaire à Midelt. C'est une association qui a été fondée en 1996 par une soeur Franciscaine: Soeur Pat Geneviève, pour l'aide de l'enfant en difficulté à Midelt.
Très brièvement, je dirais que cette modeste association a à son actif,des réalisations intéressantes:

1/ Education non formelle: 14 licenciés travaillent un peu partout dans la province de Khénifra, en partenariat avec le Ministère de l'Education Nationale. Et l'association a pu réintégrer à l'éducation formelle des dizaines de jeunes filles et de jeunes garçons.

2/ Avec l'aide d'un grand partenaire Européen, l'association a pu réaliser dans un quartier démuni de 4600 habitants, un centre socio-éducatif qui sert de bibliothèque (2600 livres), de cyber (5 ordinateurs) et d'atelier de couture et de broderie pour les habitants de quartier .

3/ En outre, l'association distribue des aides alimentaires et vestimentaires ainsi que des fournitures scolaires. Elle s'occupe de certains malades démunis: elle a pu envoyer dernièrement, à titre d'exemple, un enfant qui a eu un traumatisme de l'oeil pour se faire opérer en France.

En plus de tout cela, l'association compte des adhérents en France et reçoit, chaque année, une vingtaine de jeunes Français qui viennent aider dans la réalisation de certains projets sur le terrain. Elle joue, par ce biais, un trait d'union entre le Nord et le Sud en ces moments difficiles où le dialogue entre les deux rives est primordial.

Q : Vous avez été l'un des acteurs et fondateurs de l'Association des anciens élèves de Ksiba du collège Moha Ou Saïd en 1984. Personne n'en parle aujourd'hui; peut-on savoir pourquoi.

R : A la deuxième réunion du Bureau de cette association fait de Cadres respectables de Ksiba, il s'était avéré que certains fondateurs principaux étaient venus non pas avec un esprit purement associatif, mais pour d'autres buts personnels; ce qui avait fait d'elle une association mort-née.

Q : Vous avez publié (ou copublié avec votre femme El Omari Zohra) plusieurs ouvrages dont:"la medecine traditionnelle"; pourriez-vous nous en donner quelques précisions?

R : Les thèses de Doctorat en Médecine de mon épouse et de la mienne étaient sur deux aspects différents de la Médecine traditionnelle au Maroc. Nos jurys respectifs nous avaient encouragés à les éditer. C'est ce qui nous a poussé de réaliser une synthèse en 1985, dont le fruit est :"Nos plantes médicinales"; un travail qui a rencontré un certain succès puisque nous le rééditons pour la 3è fois.

Q : Vos souvenirs de la ville de Ksiba restent toujours dans la mémoire; voulez vous nous en rappeler quelques uns (enfance, adolescence, adulte...)?

R : Ksiba de mon enfance était belle et gaie. Avec sa place près de la grande mosquée faite de gradins bien arrangés, avec leur garde-fou en fer forgé. C'était la place de jeux de notre enfance.
Tous les samedi, nous y assistions à la Halqua du grand conteur originaire du village: Feu Ouhassou. Il nous faisait rêver et voyager dans son monde oriental et magique.

A Ksiba, en cette période, il y avait des sources limpides un peu partout. Les pluies fines qui duraient plusieurs jours rendaient la nature verdoyante et riche. La nature luxuriante de cette période nous gâtait de ses friandises multiples et gratuites: tabgha, sasnou, iderrane ,l'kharoub etc...

Tout le monde se connaissait à Ksiba, le nombre de familles était réduit; nous étions élevés dans une ambiance "porte ouverte" faite de tolérance, de sécurité et de joie.

Q : Quelles sont à votre avis les causes qui font que la ville de Ksiba, en terme de développement socio-économique, est encore en deçà des attentes, ou du moins en comparaison avec les villes de la région?

R : Les principales causes qui font que Ksiba n'est pas encore sur les rails du développement sont à mon avis l'ignorance et la misère.

L'ignorance entretient chez l'écrasante majorité des Kasbaouis un discours oral teinté de mentalité primitive basé sur le rituel et les pactes sociaux ancestraux tels que l'Amoutl et l'Aahd. C'est le discours des Ijemmaânes du début du siècle qui sévit toujours à Ksiba. Exemple: on entendra toujours dire : " Amoutl Iouna Ghifs Islemen", "Amoutl Iouna Iyrane Ghif Flane"; "Amane Ouine Tmazirte"; Our’n T'Khellas Dariba".....

Cette mentalité ne peut que porter préjudice à la démocratie et, du coup au développement, dans le village.

Aucun intellectuel, aucun démocrate de bonne volonté ne peut supplanter cette mentalité ancestrale.

En outre, il ne faut pas s'attendre à ce que les habitants qui trouvent des difficultés à subvenir aux nécessités quotidiennes de base, contribuent à un vrai projet d'avenir quelconque. Leur mode d'existence se fonde sur l'immédiat et le concret; ils ne pensent qu'au travail quotidien.

Par conséquent les défis qui se présentent aux décideurs Kasbaouis sont colossaux. Et la solution, à mon sens, doit passer par l'élaboration de projets appropriés à la région par l'état, le conseil municipal et l'élite associative locale et nationale. Elle doit passer également et surtout par une grande révolutions des mentalités, et ce par un investissement dans le culturel, l'éducation des enfants et la sensibilisation de la population. Ce n'est pas parce que les Kasbaouis ne sont pas consommateurs de culturel qu'il faut négliger ce créneau. Des tables rondes, des conférences sur des thèmes diversifiés: économiques, hygiéniques, droits de l'homme, démocratie etc... seront d'un grand secours à ces populations marginalisées.

Q : Un projet qui vous tient à coeur et que vous rêvez de réaliser au profit de Ksiba?

R : Un centre socio-éducatif pour l'aide de l'enfant en difficulté à Ksiba, à l'instar de celui qu'un grand partenaire Européen a construit à Midelt pour l'association dans laquelle je milite.

Q : Un conseil, un appel, une suggestion, une recommandation au conseil municipal de Ksiba.

R :- Que le conseil accorde des facilités pour la construction d’un hôtel a Taghbalout (octroie gratuit d’un terrain). Je pense que l'emplacement est intéressant à plus d'un égard. Il constitue une étape intéressante entre Fès et Marrakech, un passage obligé vers Imilchil et un lieu de détente et de fraîcheur pour les habitants de la région de Beni-mellal.
- Qu'il pense à la création d'une colonie de vacances pour les enfants des MRE, à l'instar de celle de Sâidia.
- Enfin qu'il s'intéresse au culturel qui fait vraiment défaut à Ksiba.

Q : A quoi vous font penser ces mots: -TAGHBALOUT? -AFLANIFRANE? -USK? -LAMHARK?

R- Taghbalout: Taghbalout a un charme magique qui reste ancré dans la mémoire des enfants du terroir. Qui parmi les anciens de Ksiba , à l'évocation de Taghbalout, ne se remémore ses chalets en bois, sa guinguette, ses jardins enchanteurs, sa petite rivière avec ses galets naturels, ses sources d'eau intarissables, ses arbres majestueux hauts en couleurs en automne, sa fraîcheur et sa brise dans les soirées étouffantes d'été.

Il est rare de voir deux Kasbaouis se rencontrer sans évoquer leur perle; et peu importe que cette rencontre ait lieu à Casa, à Montréal ou juste à côté à Boujaâd.

Malheureusement Taghbalout connait aujourd'hui de sérieux problèmes : la défaillance de l'infrastructure, le manque d'entretien, et surtout le comportement passif voire agressif des occupants en été(où elle se transforme en véritable"souk d'Aydoud"). Enfin, il ya surtout le manque d'une stratégie volontariste de sauvegarde de la part des autorités publiques.

De point de vue champs d'action, à mon sens, la sauvegarde de ce patrimoine naturel ne pourrait se réaliser que dans un cadre coopérationnel où les ONG locales, nationales et internationales seraient appelées à appuyer solidement les efforts fort louables du conseil actuel.

- Afelanifrane: un site pittoresque, je ne peux évoquer Aflanifrane sans me rappeler la voie ensorcelante de deux jeunes filles qui battaient leur linge sur les pierres de la source, en chantant à gorge déployée la première chanson de Rouicha "Abibiou Srouye"; la fôret leur faisant écho, c'était sublime.
Aflanifrane équivaut à "Tikhirrite": cette figue sauvage qui n'existe nulle part ailleurs.

Hélas, j’ai dernièrement visité Afelanifrane et je trouve que le site a été défiguré par le béton ; je pense que les Kasbaouis nostalgiques ne pourront plus chanter : »Aflanifrane Ay Irouda Oumalou ».

- L'USK me rappelle cette période de notre adolescence sereine où le sport, la musique, le roman prenaient une partie importante de notre temps.
D'autre part, je ne peux invoquer l'USK sans parler de Feu Alami Aziz, cet ami que nous avons perdu récemment et que Dieu ait son âme!

- Lamhark : notre promotion a vécu une enfance inoubliable dans cette place centrale du village. C'est là où nous avons vu notre premier cirque, où nous jouions au foot entre quartiers ; c'est là également où nous assistions aux festivités de la fête du trône, aux Ahidous et à la fantasia.

Q : Que pensez-vous du site ELKSIBA.COM ?

R : Ksiba qui traîne le pas derrière les villes de sa taille, du point de vue socio-économique, se compte aujourd'hui parmi les premières villes marocaines bénéficiant d’un site. Grande consolation grâce au travail louable de Hassan. Merci Hassan.

Q : Un dernier mot aux habitants de Ksiba?

R : Que les partis politiques de Ksiba et la société civile locale se tendent la main pour qu'ils soient soudés au delà de leurs différences, pour sortir notre beau village du marasme sévère et du chaos dans lequel il végète. Enfin, que les jeunes générations des MRE s'intéressent à la terre de leurs ancêtres; et que les jeunes résidents à Ksiba se désolidarisent de l'esprit tribal et rebelle de certains parents qui entravent encore l'évolution des bonnes volontés dans le conseil municipal.

Entretien préparé et réalisé par Mustapha Abbassi il y 'a qqs années.

dimanche 12 février 2012

Le Respect de la loi- Fondement d'une nation civilisée


Le respect de la loi du code de la route , et de la loi en général, est la base des nations civilisées. Sous d'autres cieux, l'agent de l'ordre arrêtera et verbalisera tout contrevenant, quelque soit son rang social. Ne pas porter sa ceinture de sécurité ou brûler un feu rouge dans les pays civilisés, est un signe d'esprit rétrograde.

Le port de la ceinture de sécurité devenu obligatoire depuis peu dans notre pays n'est malheureusement pas respecté par tous nos concitoyens. En plus de son effet sécuritaire vérifié (le taux de mortalité des personnes non ceinturées lors d'un accident est presque de trois fois plus élevé que celui des personnes utilisant la ceinture); le port de ceinture de sécurité est une grande preuve de civisme.

L'anecdote, racontée par Réda Lamrini, dans son travail fort intéressant " le Maroc de nos enfants", eddif page 156, et que je tiens à partager avec les lecteurs du blog, est pleine d'enseignements à cet égard. Elle démontre que le fait de brûler un feu rouge ou ne pas mettre sa ceinture de sécurité n'est pas seulement un problème sécuritaire, mais un problème de comportement de l'individu.

L'anecdote :

"Notre personnage, chef d'entreprise de son état, venait d'accueillir à l'aéroport, son visiteur européen. La rencontre était importante. Il s'agit de la signature d'un contrat de partenariat pour un investissement au Maroc dont la production est destinée au marché étranger. Sur le chemin qui mène vers la ville, notre chef d'entreprise, personnage influent , brûla un feu rouge, comme cela est devenu coutumier. Devant la mine effrayée et choquée du visiteur, notre chef d'entreprise prit un temps rassurant, affirma qu'il n'y a pas de quoi fouetter un chat et fit état de ses introductions en haut lieu. Cette histoire de partenariat se termina plutôt que prévu par le retour de l'investisseur étranger à son pays par le premier avion. Il expliqua plu tard dans une correspondance de sa renonciation au projet: il n'était pas rassuré au sujet de son investissement dans un pays où les citoyens n'ont guère de respect pour une loi aussi banale qu'un arrêt au feu rouge. Édifiant!"

vendredi 27 janvier 2012

ADIEU ROUI…CHA*, REPOSE EN PAIX Par Salah Abdelmoumen


Je ne saurai dire si avec ma plume aussi acérée soit elle, en transcrivant quelques gallicismes placés bout à bout plus ou moins adroitement, je pourrai rendre hommage à ce grand homme, à Rouicha l’unique, l’incomparable. Mais je supplicierais le verbe sans hésitation, en guise de reconnaissance, pour parler de cet être fabuleux et affable, humble et courtois.

Cet homme qui a su pendant de longues années faire vibrer à travers son timbre de voix et son « Raghoul » la corde de l’espoir dans les cœurs meurtris de ses auditeurs les rendant complètement ralliés à sa cause.
Ce fut l’un des rares chanteurs à avoir fait l’unanimité chez le public Marocain qu’il soit arabophone ou berbérophone. Il avait un don du ciel depuis son jeune âge et bien vite tous les jeunes de son époque, n’ayant pas résisté à l’attrait de sa musique, l’ont pour la plupart adopté définitivement et nombreux d’entre eux se sont mis sur ses traces en imparfaits imitateurs. Moi-même, j’ai troqué mon luth dans le temps pour me convertir à l’Outar, cet instrument que Feu Mohamed Rouicha adulait et cajolait comme un enfant.

Cet instrument qui incarne la culture amazigh dans l’Atlas et qui risquait de tomber dans la désuétude renait de ses cendres grâce aux doigts en or du maitre et à son potentiel créatif inouï. Eh oui l’histoire se rappellera que cette sublime innovation du rajout de la quatrième corde qui lui est attribuée sans aucune contestation a permis à cet instrument de gagner ses titres de noblesses au point qu’il fut plus tard introduit dans de grands orchestres de musique classique au Maroc.

Mohamed Rouicha, l’empathique, le généreux est parti en laissant derrière lui un registre plein de chansons et de réalisations qui ont fait le bonheur de ses contemporains. Ses innombrables albums sont une richesse pour le patrimoine culturel marocain. Je me rappelle, sa maison et notamment un grand salon au rez-de-chaussée orné de tapis zaianis où il recevait ses visiteurs les bras ouverts et donnait sans compter. Il prodiguait conseils aux apprentis « outairis »  dont je faisais partie dans le temps sans la moindre réserve. Que Dieu l’accueille dans sa céleste demeure au milieu des sains musulmans de ce monde et qu’il le recouvre de sa miséricorde.
Que ses amis et inséparables « Mouloud ou Hammouch », Lahcen «dit el mouftil », Mustapha menni et bien d’autres ainsi que tous ses fans trouvent ici l’expression des mes sincères condoléances. Que ses enfants sachent que tous les marocains se joignent à eux dans cette douloureuse circonstance.

*ROUI..CHA : Concocte quelques choses (en berbère)

Salah ABDELMOUMENE- Rabat

dimanche 22 janvier 2012

FEU ROUICHA a trépassé pour allumer des brasiers ailleurs : Par Majid Blal


L'OUTAR EST TRISTE, L'OUTAR EST DEVENU ORPHELIN!

Feu Rouicha, tu avais allumé le brasier de la culture marocaine avec ton Outar et la lumière des étincelles risque de nous réconcilier avec nous mêmes!
Au-delà des gouts musicaux. Au-delà des clivages identitaires et des perceptions biaisées de certains modernismes qui refusent et méprisent l’authentique, il y a le constat de l’apport de Rouicha.

Au-delà des particularismes régionalistes, linguistiques, claniques, tribaux, il y a des marocains qui se reconnaissent dans leurs artistes qu’importent d’ou ils émergent. Quartier, montagne, plaine, ville, campagne…
Au-delà de ces complexées de l’histoire qui ne valorisent les leurs que s’il y a boomerang par le label occident et de la certification « Produit reconnu par les pays clinquants », il y a les connaisseurs de la trame marocaine.
Ce genre de sans personnalités qui ont attendu que le Jazz fasse du « Gnaoui » un genre respectable pour qu’ils l’adoptent dans leurs mœurs et lui donnent la stature dans leur appréciation, n'est souhaitable que comme exception.
Je n’impose rien ni culpabilise personne. Je constate que certains marocains ne reconnaissent la valeur de leur patrimoine que si l'occident leur en dit du bien, que si l’occident le leur dit…Je ne parle pas des gouts et des couleurs où chacun peut vaquer à sa guise...
Rouicha devrait être une icône de l’appartenance au pays des Atlas, un symbole exhibant un patrimoine dans le quel s’identifient toutes les composantes de la société.
Une fierté de tous les enfants de ce pays qui voient un chantre de la culture incarner leur Maroc pluriel. La spécificité de la phrase musicale de Rouicha empreinte de Marsaoui comme de plusieurs autres apports locaux, n’est que le fruit d’un mÉtissage en cours depuis si longtemps avec le reste de l’humanité
Rouicha n’est pas uniquement le chantre d’un genre musical ni d’une ethnie, ni du moyen et du haut Atlas. Il était l’aboutissement d’un combat pour se faire une place dans le cœur de tous.
Ce serait de mauvaise foie, malhonnête et surtout suffisant d’en faire uniquement le chantre de l’amazighité. Le représentant troubadour d’une partie de la population non citadine,… Penser ainsi c’est lui accoler un statut réducteur, lui concéder et le confiner dans une reconnaissance minimaliste, méprisante et méprisable.
Rouicha était autant à l’Outar que ce qu’était Ravi Shankar à la cithare. Comme ce dernier, Rouicha ne mérite pas plus qu’un statut national pour la dimension identitaire des marocains et un statut d'artiste universel pour la dimension musicale et culturelle.
Alors si vous êtes marocains(es), ne me dites pas Winekh ! Comme un clin d’œil complice et complaisant mais dites moi Winekh où vous êtes inclus(es) comme référence à un particularisme commun, qu’on met au service de l’universalisme.
Rouicha le symbole d’un Maroc qui veut se débarrasser des démons de l’essentialisation par la Musique.
Adieu Rouicha, on t’aimait bien
Salut l’Artiste, je t’aimais bien
Sherbrooke le 17 janvier 2012

mardi 17 janvier 2012

Mohamed ROUICHA n'est plus


C'est en ce mardi gris d'hiver, ce 17 Janvier 2012, que le grand artiste de l'Atlas Mohamed ROUICHA nous quitte à l'âge de 62 ans.
La disparition de ce grand chanteur marocain est une douloureuse épreuve pour son grand public, à l'intérieur et à l'extérieur du pays.

Ce grand spécialiste de l'Outar (instrument typiquement marocain), a eu une réussite dans le monde artistique de l'Atlas sans équivalent.
Avec sa voix ensorcelante, et le rythme envoûtant de son "outar", il a su se maintenir des décennies durant, en haut de l'affiche.

Le talent de Mohamed ROUICHA a été salué par tous les marocains, arabophones et berbérophones .
La fin de ROUICHA, que Dieu ait son âme, est également la fin d'une époque. La chanson amazigh, est désormais un peu orpheline.

Nous nous souviendrons de toi Si Mohamed, nous écouterons tes chansons aussi longtemps que nous vivrons

A Dieu nous sommes et à lui nous retournons.

mardi 10 janvier 2012

Elisabeth Lafourcade "la toubiba" de Midelt


Dr Elisabeth Lafourcade a eu une très bonne réputation dans la région de Midelt où elle a exercé comme chirurgien pendant plusieurs années. A mon arrivée à l'hôpital de Midelt en 1981, le personnel ancien de l'hôpital me parlait de sa compétence, sa droiture, son dévouement aux pauvres... "Tamraboute" , comme l'appelaient les berbères de la région, était très aimée de tous.

Dans ce billet, je me permets de publier le témoignage de quelqu'un qui l'a bien connue pour avoir pratiqué dans la même période qu'elle mon grand ami ami Dr Maxime Rousselle.


De Tunis à Sousse, puis au Maroc, dans le bled, le docteur Elisabeth Lafourcade a donné l'exemple d'une vie entièrement consacrée aux autres, sans jamais abdiquer sa forte personnalité qui masquait mal une bonté et une compétence étonnantes.

Elisabeth Lafourcade est née le 18 septembre 1903 à Mourmelon où son père, officier colonial, était alors en garnison. Orpheline assez tôt, elle est élevée par sa grand­mère dont les ressources sont très modestes.
Attirée par la vie africaine qu'elle connaît par quelques séjours faits, enfant, avec son père, elle se sent attirée par le mode de vie du Père de Foucauld, mais ne se reconnaît pas la vocation religieuse. Alors, pour "servir" elle entreprend grâce à une bourse, des études de médecine, à Paris d'abord, puis à Montpellier, y menant la vie d'une étudiante pauvre. Pourtant, ainsi que la décrit une de ses condisciples, externe des hôpitaux comme elle, c'est une fille gaie, enjouée, dont les réparties sont fines, justes, précises, pétillantes de malice sans méchanceté, boute-en-train, mais aussi profondément sérieuse et recueillie quand elle faisait ses retraites à Lourdes. Elle a très tôt la vocation chirurgicale et elle est rapidement appréciée par les équipes auxquelles elle s'intègre. C'est avec une grande simplicité - dit un de ses patrons - qu'elle se penchait au chevet de ses malades ou des opérés et personne ne fut long à s'apercevoir, sans qu'elle en parlât jamais, qu'elle s'attachait surtout aux déshérités et que sa vigilance à leur égard ne s'éteignait pas avec la fin des soins d'hôpital.
En juillet 1929, elle est recrutée comme chirurgien à l'hôpital de Tunis. Son arrivée est mal perçue par les milieux intégristes tunisiens qui critiquent la nomination d'une femme, d'abord, mais aussi d'une femme qui n'hésite pas à afficher sa foi chrétienne. Si cette femme ne part pas, on emploiera les moyens efficaces pour la faire partir, note-t-on dans un de leurs journaux! Elle n'en a cure. Les autorités la soutiennent et elle est rapidement acceptée par les musulmans eux-mêmes.
En 1937, elle est mutée à l'hôpital de Sousse où elle entreprend d'améliorer la formation professionnelle des infirmiers, tout en continuant son activité chirurgicale.
La seconde guerre mondiale, par les restrictions qu'elle impose, complique toutes les tâches, pénurie en médicaments, en matériel, etc ... Lors du reflux des armées allemandes de Tripolitaine vers Tunis, sa maison est soufflée par un bombardement et elle trouve refuge dans une maison close de la ville. La tenancière la prend sous sa protection et l'accompagne quelquefois lors de visites de malades la nuit.
En avril 1944, elle est affectée à l'hôpital maritime de Sidi-Abdallah, avec un contrat qui l'assimile à un médecin de marine à deux galons. Malheureusement, le 2 juillet, elle contracte une fièvre typhoïde, qui pour être relativement bénigne, n'en inspire pas moins beaucoup d'inquiétude car une radio pulmonaire montre, en plus, des lésions tuberculeuses aux sommets des poumons.
Elle surmonte cette épreuve et reprend volontairement son service quelques semaines plus tard. Ne pouvant la garder en service actif, la marine l'envoie au Centre de phtisiologie de Meknès (Maroc). Elle y voit un signe de la Providence, car c'est au Maroc que Dieu me voulait dit-elle. Après sa convalescence, elle est nommée, par les Services de Santé chérifiens, chirurgienne à l'hôpital indigène Cocard de Fès (avril 1945).
En 1948, elle demande à aller à Ksar-es-Souk, dans le Tafilalet (sud marocain) où on vient de créer un poste de chirurgien. Elle y sera le seul chirurgien pour une population de plus de cent mille habitants répartis sur un territoire de 400 kms du Nord au Sud et presque autant de large. Elle est attachée à 1 'hôpital où se trouve le "plateau technique chirurgical" le plus complet, mais elle sera tenue de desservir les hôpitaux annexes de Midelt et d'Erfoud, à jours fixes mais aussi pour répondre aux urgences intransportables. Tous ses confrères sont persuadés que la rigueur du climat va lui être fatale, mais elle s'obstine et débarque à l'hôpital du Tafilalet qu'elle ne devait plus quitter. Lorsque je l'ai rencontrée pour la première fois en 1952, elle avait presque la cinquantaine. C'était une femme frêle, la poitrine légèrement rentrée, vêtue d'une robe très simple, la tête recouverte d'un petit fichu bleu qu'elle ne quittait que pour coiffer le calot de la salle d'opération. Elle me faisait penser à une religieuse laïque. Ce n'est que bien plus tard que j'appris qu'elle dépendait de l'association Jésus Ouvrier, car elle n'en faisait jamais état. Etant alors médecin-chef de l'hôpital d'Erfoud, j'avais été surpris, lors de la première visite que je lui fis, de ne pas la trouver dans un de ces logements de fonction que la Santé publique mettait à la disposition de ses médecins du bled. C'est elle qui ne l'avait pas voulu. Elle avait fait vœux de pauvreté et occupait une petite maison marocaine traditionnelle en terre, comme celle de ses malades. Un minuscule jardin servait aux ébats de Seringa, son chien et de sa gazelle, don d'une famille de malades reconnaissants.
Elisabeth Lafourcade venait régulièrement tous les quinze jours, dans son vieux Bedford, opérer Ge lui servais d'assistant) les malades que je lui avais triés. Suivant la tradition du bled, elle déjeunait à la maison ou chez quelques autres amis. Elle en avait beaucoup ! Cette fille d'un dévouement extraordinaire, avait parfois une brutalité de langage qui surprenait ceux qui la connaissaient mal. Très souvent elle "engueulait" ses malades. Après quoi, elle passait toute la nuit à leur chevet pour les surveiller. A côté de cela, une naïveté désarmante et une grande piété qui en faisait réellement une missionnaire. Tous les Marocains du Tafilalet la connaissaient et on peut même dire qu'il vénéraient leur toubiba. Un jour je suis appelé par le chef du poste de Taouz, à 75 km au Sud: ''Allo, toubib, venez vite. Nous avons un blessé grave. Il a les tripes à l'air. L'histoire est simple: un jeune homme en voulant entraver un chameau s'est fait mordre. L'animal a saisi le garçon dans sa longue et puissante mâchoire, au niveau du flan et de la région lombaire. Les incisives tranchantes ont fait une plaie avec eviscération au niveau de l'abdomen et une importante contusion dans la région lombaire. Le blessé est choqué et avec les faibles moyens dont je dispose je n'ai que la solution de l'évacuer vers Erfoud en prévenant la toubiba, à Ksar-es-Souk, de nous rejoindre. L'évacuation est lente, pour ne pas trop secouer le blessé. En arrivant à l'hôpital d'Erfoud, la toubiba est déjà là, faisant les cent pas sur le perron. Il est dix huit heures trente. "Enfin vous voilà, quelle saloperie me ramenez-vous ?"
Sur la table d'opération, c'est encore plus grave que je ne le croyais. En plus de l'éventration, il y a rupture du rein qu'il faut enlever. Toute l'intervention se fait, bien sûr, avec le seul moyen d'anesthésie dont nous disposons, le vieil Ombredanne, et sans possibilité de transfusion sanguine, rien que des liquides de remplissage : plasma et subtosan.
Vers dix heures le blessé est mis dans un lit, toujours sous le choc dont il ne semble pas vouloir sortir. Lafourcade, Hamani (l'infirmier du bloc) et moi restons près de lui.
Un peu après minuit, arrêt cardiaque, et malgré tous nos efforts nous ne parvenons pas à réanimer le pauvre gosse. Lafourcade lâche un juron, se ressaisit aussitôt et se laisse tomber sur une chaise, immobile, les mains jointes, je crois qu'elle prie un instant. - Bon, ce n'est pas tout, il faut que je reparte. J'ai un gros programme opératoire demain marin à Ksar-es-Souk. Il faut que j'aille dormir un peu.
- Mais il est plus d'une heure du marin. Ce n'est pas prudent, toute seule, sur la route. Je vais vous accompagner.
- Ah! vous m'embêtez, je suis assez grande pour rentrer toute seule ...
- Et si vous creviez?
- Allah est miséricordieux! Fichez-moi la paix et donnez-moi un café.
Ainsi était la toubiba. Je l'ai vue faire près de 500 km dans une journée au volant de sa voiture, pour une opération, puis reprendre son travail après quatre heures de sommeil. Ses moments de repos, elle les occupe à tricoter des brassières pour les nouveau-nés de la maternité. Elle accompagne, quand elle le peut, les équipes qui font les vaccinations dans le bled. Ces séances donnent lieu à de grands rassemblements et elle en profite pour dépister des malades ou des blessés qui négligent souvent d'aller en consultation. Elle se tient au courant des progrès de la chirurgie et si un instrument lui manque, plutôt que d'attendre des jours et des jours que l'administration veuille bien le lui fournir, elle n'hésite pas à l'acheter sur ses propres deniers. Dans la période trouble qui précède l'indépendance du Maroc, elle reconnaît qu'elle n'a aucun engagement politique. Son seul souci, ce sont les malades ou les blessés de quelque côté qu'ils soient. En décembre 1955, elle fait un séjour en France, à la maison-mère de Jésus Ouvrier à Tours. Elle en profite pour aller consulter ses anciens patrons de la Faculté de Montpellier pour un nodule sous le bras. Le diagnostic est formel, il s'agit d'un cancer du sein quelque peu négligé. Elle revient à Meknès, est opérée à la clinique Cornette de Saint-Cyr où elle reçoit la visite du Sultan Mohammed V venu voir une de ses sœurs également hospitalisée. Elle raconte elle-même : Sa Majesté a exprimé des vœux de guérison et le souhait que je veuille considérer le Tafilalet comme une seconde patrie, mais qu'avant de mourir, il faut que je vive longtemps pour soigner ses sujets. ... Cela valait le jus!
En janvier 1957, son état empire. Elle refuse les divers traitements qu'on lui propose. Son
courage, elle le puise dans ses retraites au monastère de Tioumliline ou à Lyon (retraite organisée en août 1957 par l'Association Jésus Ouvrier). A son retour, elle apprend qu'elle vient d'être nommée Chevalier de la Légion d'Honneur ce qui la comble de confusion.
Fin 1957, son état décline mais elle reste toujours attentive à tous ceux qui l'entourent. Tous se pressent pour l'aider, le chauffeur musulman de l'hôpital vient presque tous les jours pour la conduire à la messe, tandis qu'à ses infirmiers et au personnel de l'hôpital elle distribue de l'argent pour faire un arbre de Noël à leurs enfants.
Le 7 janvier, vers 6 heures du matin -moralement en paix- elle remettait son âme à Dieu. A son inhumation dans la terre marocaine qu'elle avait tant aimée et tant servie, il y avait foule. Non seulement tous ceux qu'elle avait soignés, mais également les autorités marocaines représentées par le docteur Faraj, ministre de la Santé, le délégué de l'Ambassade de France au Maroc, le consul de France, ainsi que la fondatrice de Jésus Ouvrier et un chanoine du clergé de Tours. En tout, plusieurs milliers de personnes de toutes origines. Le docteur Faraj devait prononcer une émouvante allocution, rendant hommage à son ardeur et à son dévouement sans limite. Au nom de sa Majesté Mohammed V, il déposa sur son cercueil la décoration d'officier du Ouissam Alaouite, pour les services éminents rendus par elle au Maroc. Elisabeth Lafourcade s'était voulue essentiellement témoin de la médecine française par sa technicité. Par son dévouement et son rayonnement, elle fut aussi témoin de la chrétienté en terre d'Islam, non en prêchant l'Evangile, mais en le vivant.


Docteur Maxime Rousselle

ex-médecin de la Santé Publique au Maroc.
BIBLIOGRAPHIE:
* Blanche Poupineau et Marcel Delabroye. Elisabeth Lafourcade. Editions du Centurion. Paris 1965.
*Docteur Maxime Rousselle, Médecins du Bled.

dimanche 1 janvier 2012

Bonne Année 2012


A tous les lecteurs du blog, je souhaite une nouvelle année 2012, riche en belles surprises, pleine de bonheur et de santé.

Beaucoup d'entre vous ont continué à fréquenter echomidelt en dépit de mon éclipse de plusieurs mois de la blogosphère.
Sachez que ce blog est le votre , vous pouvez participer à son amélioration par vos suggestions et vos articles .

En 2012, je vous promets un blog perfectionné avec plus d'articles sur différents thèmes.

Bonne et Heureuse Année à vous tous!